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2023 SPRING

Quelle place pour l’artisanat actuel ?

Mondialement connu dans sa spécialité, le designer Teo Yang cherche à transposer une esthétique actuelle dans les fabrications d’un artisanat traditionnel pour lequel il se passionne tout en suivant les dernières tendances de la création contemporaine au sein de ce domaine d’activité qui touche au quotidien.

Par le choix des réalisations exposées, le deuxième espace d’exposition de la Craft Trend Fair soulignait l’importance de l’effort individuel, cette valeur toujours plus précieuse à l’heure du tout-numérique.
Avec l’aimable autorisation de Teo Yang Studio

Situé à Séoul, le village traditionnel de Bukchon accueillait en septembre dernier l’exposition Craft of Cure and Comfort à l’occasion du vingtième anniversaire de la YÉOL Korean Heritage Preservation Society. Son organisateur et directeur en chef, Teo Yang, y avait apporté sa touche de créativité et son savoir-faire de designer pour mettre en valeur les œuvres d’artisans coréens.
Avec l’aimable autorisation de YÉOL

En Corée comme dans les pays occidentaux, l’avènement de l’art moderne a eu des répercussions sur des traditions artisanales pourtant ancestrales. À l’inverse, certaines fabrications manuelles plusieurs fois centenaires telles que le bojagi, ce tissu destiné à l’emballage, au transport et à l’entreposage d’objets, sont appréciées à l’égal d’œuvres d’art par leur facture, leurs matières et couleurs tout autant que pour des raisons d’ordre pratique.



Les pièces présentées dans le premier espace d’exposition de la Craft Trend Fair révélaient la volonté de leurs auteurs de contribuer à l’évolution esthétique et technique de l’artisanat traditionnel.
Avec l’aimable autorisation de Teo Yang Studio



Si leurs créateurs font ainsi figure d’artistes, et non de travailleurs exerçant un métier manuel, leur activité se distingue toutefois des beaux-arts et du design par son but principal, qui est de façonner des matériaux avec dextérité afin de leur conférer l’aspect souhaité. À cela vient désormais s’ajouter une plus grande diversité d’expression qu’autorise la recherche constante de nouvelles esthétiques et formes. L’artisan d’aujourd’hui n’hésite pas à innover par une association de styles et matériaux qui aboutit à des pièces procédant d’une fusion et d’une convergence artistiques.

Créée en 2006 par la Korea Craft & Design Foundation, la Craft Trend Fair (foire annuelle des tendances artisanales), l’une des plus prestigieuses manifestations du domaine, a vocation à promouvoir l’artisanat en mettant en valeur ses composantes aussi bien esthétiques que techniques. L’organisation de son édition de l’année dernière, dont le thème s’intitulait « Défis actuels, réponses d’artisans », avait été confiée au célèbre directeur artistique Teo Yang. Ce dernier allait s’attacher à fournir aux artistes un cadre de réflexion propice à la recherche de solutions aux phénomènes de société que sont la standardisation du mode de vie, la déshumanisation entraînée par l’omniprésence du numérique et la dégradation de l’environnement, qu’il soit ou non naturel. Cet important rendez-vous annuel a bénéficié d’une hausse de fréquentation dans des tranches d’âges jeunes, s’agissant des exposants comme des visiteurs, en raison de l’intérêt que présentaient les problématiques abordées et du goût actuel plus marqué pour l’artisanat.

Le designer Teo Yang s’est fait connaître par de remarquables réalisations d’aménagement d’intérieur, notamment celles portant sur la salle du royaume de Silla du Musée national de Gyeongju et sur la salle d’exposition permanente du Musée national du hangeul, ainsi que sur la rénovation de la galerie d’art Kukje. En 2020, il allait être le premier Coréen à faire son entrée dans l’AD100 d’Architectural Digest, ce répertoire des plus grands noms du design, de la décoration intérieure et de l’architecture. Teo Yang s’emploie à mettre en application la conviction qui est la sienne que l’artisanat peut apporter des solutions novatrices aux enjeux contemporains de durabilité et de diversité en s’appuyant sur les enseignements du passé pour mieux préparer l’avenir.

Quelles sont les tendances actuelles dans l’artisanat ?

Dans le quartier de Cheongdam-dong situé à Séoul, Teo Yang, directeur du cabinet Teo Yang Studio, se tient dans le salon d’exposition des meubles de la marque Eastern Edition qu’il a créée en 2021. Ce mobilier au style intemporel résulte d’une nouvelle lecture de l’esthétique coréenne mieux adaptée au mode de vie actuel.
Avec l’aimable autorisation de Teo Yang Studio



Je pense qu’il n’est pas pertinent de parler de tendances à propos de l’artisanat, car il ne saurait céder à l’influence des modes au risque de s’éloigner de la culture dominante et de cesser de faire des progrès. En réalité, il s’inscrit en faux contre l’impératif de concurrence qui régit la société en offrant un espace d’expression à des créateurs désireux de s’affranchir des conventions esthétiques dans leur quête d’authenticité, ce qui peut expliquer son attrait pour les jeunes générations.



Quel rôle joue-t-il dans la société ?
Il y a lieu de s’inquiéter quand on constate que des produits d’usage courant sont en grande partie méconnus du public, notamment leurs composition, origine et procédé de fabrication, mais aussi leur mode de recyclage ou de destruction dans le cas de ceux que l’on jette. En rompant avec ces pratiques, l’artisanat sensibilise le public au facteur important qu’est la durabilité.



Comment l’artisanat peut-il apporter une réponse aux problèmes de société ?
S’il ne peut évidemment pas les résoudre en totalité, le questionnement qu’il suscite est en lui-même très important. En ce qui me concerne, le design représente à la fois un regard critique porté sur la société et, par le biais de l’art, des réponses bien conçues aux problèmes qui s’y posent. Je passe mon temps à rechercher les moyens de relever certains de ces défis tout en m’interrogeant sur la durabilité réelle du monde où nous vivons.

Dernièrement, en séjournant à Kyoto pour des vacances, j’ai pris conscience du risque que nous courons aujourd’hui d’oublier l’Histoire en étant tout entiers tendus vers l’avenir. En préservant les traces de son passé, cette ville est parvenue à inscrire l’innovation dans la continuité de l’histoire. Le design doit lui aussi s’insérer dans une perspective historique.

L’artisanat s’avère très précieux à cet égard, car ses traditions se transmettent de génération en génération. Peut-il dès lors contribuer à la résolution des problèmes qui se posent ? Je le pense, moyennant l’adhésion du public, qui est libre d’adopter ou non ses créations.



Qu’en est-il de l’esthétique traditionnelle coréenne ?
Quand je l’évoque, c’est pour parler du patrimoine culturel. Je souhaite pouvoir faire peu à peu revivre certains de ses aspects qui ont été négligés, voire laissés à l’abandon, car ils peuvent constituer un apport important sur le plan esthétique. La connaissance de notre histoire et la conservation des traditions formatrices de notre identité participent de la construction d’une civilisation plus brillante.



Quel est l’avenir de l’artisanat coréen ?
Des perspectives plus favorables semblent se dessiner. En matière d’artisanat, la Corée possède un riche savoir-faire qui s’est transmis au fil du temps et que nombre de jeunes s’attachent avec talent à perpétuer dans leurs créations. Lorsqu’il m’a été donné de travailler avec des artisans, j’ai pu constater par moi-même à quel point ils éprouvaient l’amour du travail bien fait. Les nouvelles fabrications sont appelées à faire partie du quotidien si le public se montre ouvert à l’innovation et leur fait bon accueil.



Comment peut-il les adopter ?
Les réticences du public se comprennent fort bien en raison du prix élevé des fabrications artisanales, ou plus exactement, de certaines d’entre elles, car, dans bien d’autres cas, il s’avère abordable, voire proche de celui des articles de série équivalents. Cette idée fausse s’explique souvent par un manque d’information résultant souvent du fait que l’on n’ose pas poser de questions. Je vous engage à comparer les prix des produits artisanaux et industriels, ce qui vous permettra de constater à votre grande surprise que les premiers surpassent les seconds par leur rapport qualité-prix, car ils ne font qu’embellir avec l’âge et l’usage.



Pourriez-vous préciser le sens du thème de cette foire ?
L’idée que « l’histoire se répète » s’avère souvent exacte. Tout est parti d’une réflexion sur la place de l’artisanat dans les foires et de l’idée que, dans ses métiers, il ne suffit pas de se voir décerner de prestigieuses distinctions comme le prix de la Fondation pour l’artisanat, car il faut aussi savoir continuer à les mériter. Si une telle reconnaissance est gratifiante pour nos métiers, il importe avant tout de comprendre en quoi leurs réalisations sont adaptées à la vie quotidienne, faute de quoi elles risquent de ne plus répondre aux attentes.



Qui cette manifestation a-t-elle mis à l’honneur ?

Due aux céramistes Kim Deok-ho et Lee In-hwa, son épouse, la série Collect figurait dans l’exposition The Mind Pond proposée de juin à juillet derniers par la galerie Lkate du quartier de Seongbuk-dong situé à Séoul. Teo Yang a salué la présence d’éléments de l’artisanat traditionnel dans leurs créations.
© Kim Deok-ho, Lee In-hwa

Lors des précédentes éditions, un très large éventail d’exposants avait été envisagé et il a donc fallu procéder à une sélection aussi complexe que délicate. Si d’aucuns peuvent légitimement avoir l’impression d’une certaine répétitivité dans nos choix, j’estime indispensable, pour aiguiser la curiosité et susciter des vocations, d’accorder la priorité aux grands noms de l’artisanat coréen, ces Kim Ok, Lyu Nam-gwon, Kim Deok-ho et Lee In-hwa qui méritent de faire mieux connaître leurs œuvres admirables. Ceci dit, nombre d’autres artisans sont à l’origine de créations de valeur.



Quel est le projet qui vous a le plus marqué ?
Dernièrement, les projets que j’ai entrepris aux côtés de Kim Deok-ho et de Lee In-hwa nous ont conduits à participer à cette édition de la Craft Trend Fair, mais se sont aussi concrétisés par la réalisation du superbe magasin Blue Bottle de Myeong-dong. Ces deux artisans ont ajouté une touche raffinée à sa décoration intérieure sous forme d’un panneau de porte en céramique et par la création d’un élégant logo. Persuadé qu’il faut impérativement faire découvrir nos talentueux artisans à un plus large public, le designer que je suis recherche sans cesse de nouvelles occasions de collaborer avec les gens du métier. Ma participation au projet Blue Bottle témoigne de cette conviction qu’un tel travail commun ne peut que favoriser le perfectionnement technique et les qualités artistiques des fabrications artisanales.



Shin Min-heeJournaliste au Korea JoongAng Daily

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