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Tales of Two Koreas > 상세화면

2019 SUMMER

LA VIE

HISTOIRES DES DEUX CORÉES Ce qui reste à réinventer

Créée par des étudiants coréens résidant aux États-Unis, Liberté pour la Corée du Nord (LiNK) est une ONG qui a vocation à faciliter l’intégration des réfugiés nord-coréens de par le monde. Pour Sokeel Park, qui dirige son antenne de Séoul, ces ressortissants peuvent contribuer à faire évoluer plus rapidement la situation de leur pays, mais il n’en demeure pas moins que des changements s’imposent aussi en Corée du Sud.

Dans le cadre de l’antenne de LiNK qu’il dirige à Séoul, Sokeel Park vient en aide aux réfugiés nord-coréens et les aide à s’insérer. Des étudiants américains appartenant à la deuxième génération de Coréens vivant aux États-Unis ont créé en 2004 cette ONG dont le siège se situe à Washington.

Àson arrivée en Corée du Sud, en 1998, le Coréano-Américain Sokeel Park n’a pas manqué de remarquer certains autocollants rouges des fenêtres des bus et son père, qu’il interrogeait à ce sujet, lui a alors expliqué qu’il s’agissait d’un avis des autorités appelant la population à signaler la présence d’espions nord-coréens.

Aujourd’hui, Sokeel Park s’emploie à informer les Sud-Coréens sur ces hommes et femmes qui vivent hors des frontières nationales, et ce, non à titre personnel, mais en tant que représentant d’une organisation non gouvernementale située aux États-Unis. Dénommée Liberté pour la Corée du Nord (LiNK), cette ONG se consacre à l’accueil et à l’insertion des réfugiés nord-coréens avec le concours de 275 partenaires répartis sur pas moins de seize pays différents, dont les États-Unis, le Canada, la Grande-Bretagne et le Japon.

Sokeel Park et le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un ont pour point commun d’avoir trente-cinq ans et le premier est persuadé que les gens de son âge seront les artisans d’évolutions décisives sur la péninsule coréenne. Il affirme d’ailleurs que, si le destin avait voulu qu’il naisse en Corée du Nord, il aurait fait partie de cette génération dite des « jangmadang ». Orthographié « changmadang » en Corée du Nord, ce terme désigne les premières formes de marché noir qui sont apparues dans les années 1990 et ont amorcé une conversion à l’économie de marché suite à l’effondrement de l’ex-Union soviétique et à l’interruption de son aide économique, auxquels allaient s’ajouter plusieurs catastrophes naturelles successives.

Ces jangmadang nord-coréens, qui représentent aujourd’hui un quart de la population de leur pays, diffèrent considérablement de leurs aînés en ce qu’ils vivent depuis toujours sur les ruines d’une économie socialiste. Ceux qui ont trouvé refuge à l’étranger affirment presque tous ne s’être jamais vu distribuer de rations alimentaires par le Parti des travailleurs et leur mentalité, tout comme leurs valeurs morales, s’inscrivent en rupture avec celles de leurs parents et grands-parents du fait qu’ils disposent de relativement plus d’informations venant de l’extérieur. Les produits audiovisuels de contrebande qu’ils parviennent à se procurer leur ouvrent d’autres horizons, à l’instar de ces feuilletons télévisés sud-coréens et films chinois qu’ils prennent pour modèle dans leur manière de vivre.

Aux yeux de Sokeel Park, le rôle joué par ces jangmadang s’ajoute aux facteurs clés de l’évolution du pays que sont l’adoption d’une économie capitaliste, la corruption endémique, l’accès croissant à l’information, les contacts qu’entretiennent les réfugiés avec leurs proches restés au pays et l’activité de réseaux personnels échappant au contrôle de l’État.

La genèse d’une ONG
Après sa création en 1989, l’organisation de Sokeel Park, qui portait à l’origine le nom de Korean American Students Conference (KASCON), s’est intéressée toujours plus à la situation des ressortissants nord-coréens qui avaient fui leur pays et celle-ci allait rapidement figurer parmi les points principaux mis à l’ordre du jour de sa réunion annuelle. Pour ne pas se borner à en débattre, un groupe d’étudiants américains d’origine coréenne de l’Université de Yale allait en 2004 créer l’ONG LiNK, dont le siège se situe à Washington. Si LiNK bénéficie dans son fonctionnement des dons provenant de divers organismes ou particuliers tels que des hommes affaires, des groupes religieux et bien évidemment ses propres membres, elle tire aussi des recettes de la vente de t-shirts, biscuits, boules à thé et bouchées à la pâte de riz, ainsi que de concerts qui lui permettent de réunir des fonds. En revanche, elle ne perçoit pas la moindre subvention d’un quelconque gouvernement.

L’essentiel de ses dépenses porte sur l’aide apportée à des réfugiés nord-coréens vivant dans la clandestinité en Chine, à raison d’environ 3 000 dollars par personne. Elle s’assure en outre de leurs conditions d’accueil dans un pays d’Asie du Sud-Est de leur choix parmi ceux par lesquels ils transitent le plus souvent. Quant aux Nord-Coréens qui souhaitent s’installer aux États-Unis, ils se voient proposer cours d’anglais et formation professionnelle.

Depuis qu’elle exerce ses activités, LiNK a secouru et aidé à s’intégrer plus de 1 000 réfugiés nord-coréens, cette action ayant eu lieu au cours de la seule année 2018 pour près d’un tiers des personnes concernées.

Au printemps et en automne, l’ONG lance aussi son « Programme nomade » dans le cadre duquel des étudiants et diplômés sillonnent les États-Unis et le Canada dix semaines durant en vue d’informer le grand public des questions ayant trait à la Corée du Nord et aux conditions de vie de ses habitants. Faisant équipe à trois, ils se rendent au total dans 1000 lieux différents, comme Sokeel Park, qui s’est déplacé aux quatre coins du territoire et jusque dans les plus petites villes où il a eu la joie de constater que la population était prête à apporter son aide.

Photos transmises par des adhérents des 275 clubs qui soutiennent l’action de LiNK dans seize pays différents du monde.© LiNK

Sokeel Park et son équipe posant devant leur antenne de l’arrondissement de Junggu situé au centre de Séoul.© LiNK

Dans une vingtaine, voire une dizaine d’années, d’après Sokeel Kim, la Corée du Nord aura connu de grands changements et, dans cette perspective, la jeunesse sud-coréenne doit avant tout faire preuve d’ouverture d’esprit envers celle de ce pays.

Un rêve devenu réalité
Né de père coréen et de mère britannique dans la ville de Manchester, Sokeel Park a passé son enfance en Grande-Bretagne et c’est à l’âge de treize ans qu’il a pour la première fois foulé le sol sud-coréen à l’occasion du transport de la dépouille funèbre de sa grand-mère vers son pays d’origine. L’anecdote des autocollants d’autobus allait lui faire prendre conscience de l’hostilité qui régnait alors entre les deux Corées.

Ses grands-parents paternels étaient natifs de Myongchon, une ville de la province nord-coréenne de Hamgyong, dont ils étaient plus tard partis pour le sud de la péninsule et qui est réputée pour les beautés de son mont Chilbo. Elle tire aussi sa notoriété des champignons de pin, ceux-là même qu’allaient offrir le défunt dirigeant nord-coréen Kim Jong-il et son fils Kim Jong-un à leurs homologues sud-coréens. C’est en 1968 que le père de Sokeel Park, qui venait de terminer ses études secondaires, allait suivre sa mère en Grande-Bretagne, dont elle avait épousé un ressortissant après le décès de son premier mari. Par la suite, ce père traducteur et interprète allait souvent lui parler du pays natal et l’encourager à regarder tous les reportages de la BBC qui lui étaient consacrés.

Suite à l’obtention d’un diplôme de psychologie à l’Université de Warwick, Sokeel Park a, pendant un an, étudié le coréen à l’Institut de langue coréenne de l’Université Yonsei. En 2007, il a effectué un nouveau séjour dans la capitale, où il a travaillé un an au ministère de l’Intérieur et de la Sécurité, notamment dans le cadre de missions d’information économique et culturelle auprès des représentants de pays en développement.

Deux ans plus tard, il allait se voir décerner une maîtrise de relations internationales par la London School of Economics, suivie d’un stage au siège new-yorkais des Nations Unies. Les rencontres de réfugiés nord-coréens qu’il fera à cette époque l’inciteront à épouser leur cause.

Dans un premier temps, le jeune homme s’était fixé pour objectif d’être recruté par l’ONU ou le British Foreign Office et c’est tout à fait par hasard qu’il allait s’engager aux côtés de LiNK, après avoir assisté à une conférence de Mike Kim, le fondateur de l’ONG Crossing Borders, qui fournit une assistance humanitaire aux réfugiés nord-coréens et à leurs enfants vivant en Chine. Né à Chicago, cet analyste financier d’origine coréenne venait alors de publier son livre Escaping North Korea, qui décrit la pauvreté en Corée du Nord et la vie des réfugiés issus de ce pays, l’aide qu’il apporte à ces derniers en Chine lui ayant déjà valu une arrestation. C’est ce même Mike Kim qui poussera Sokeel Kim à proposer ses services à LiNK.

La présidence de l’antenne de Séoul
L’ONG ouvrant une nouvelle agence en 2012 dans la capitale sud-coréenne, Sokeel Park allait aussitôt renoncer à embrasser la carrière diplomatique et se joindre aux huit personnes qui composaient son personnel. Cette antenne séoulienne a pour mission principale de secourir et défendre les réfugiés nord-coréens, ainsi que de faciliter leur insertion dans leur pays d’accueil. En Corée du Sud, les besoins s’avèrent particulièrement forts en matière d’aide à l’adaptation et à l’intégration en raison du fossé culturel, économique et politique qui existe entre les deux pays.

Dans une vingtaine, voire une dizaine d’années, d’après Sokeel Kim, la Corée du Nord aura connu de grands changements et, dans cette perspective, la jeunesse sud-coréenne doit avant tout faire preuve d’ouverture d’esprit envers celle de ce pays.

À cet effet, Sokeel Park cherche notamment à sensibiliser les jeunes à la situation des réfugiés, stupéfait par leur manque d’information dans ce domaine, alors que le nombre de ces nouveaux arrivants dépasse aujourd’hui 30 000.

Sokeel Park estime que la Corée du Nord aura beaucoup changé d’ici à dix ou vingt ans et que les jeunes Sud-Coréens doivent avant tout faire preuve de compréhension envers leurs compatriotes du Nord. Pour l’heure, ils s’avèrent cependant être d’une grande indifférence.

En règle générale, les Sud-Coréens ont des idées arrêtées sur la Corée du Nord, dans laquelle ils voient avant tout les futures possibilités commerciales que leur offriront ses énormes ressources naturelles et sa main-d'œuvre à bon marché suite à la réunification, tandis qu’ils considèrent ses citoyens comme de simples compatriotes. Sokeel Park pense qu’en cas d’ouverture aux capitaux étrangers, cette manière de voir le pays pourrait faire obstacle au règlement d’éventuels conflits sociaux.

Par ailleurs, il n’apprécie guère que son ONG LiNK soit souvent présentée comme un groupement de militants des droits de l’homme, craignant qu’elle ne soit assimilée à la gauche et que ses activités en pâtissent, car, dès qu’il s’agit de la Corée du Nord, nombre de Sud-Coréens ont tendance à considérer comme telle toute organisation œuvrant en ce sens. Sokeel Park se garde d’ailleurs faire mention de ces droits et tient à souligner que LiNK ne se classe ni à droite ni à gauche, tout en persistant à penser que ce pays ne peut prétendre à se joindre au concert des nations s’il n’accomplit pas de progrès dans ce domaine.

À tous ceux qui estiment qu’à trop mettre en exergue la question nord-coréenne des droits de l’homme, la communauté internationale risque de freiner encore le processus d’abandon du programme nucléaire de ce pays, Sokeel Park répond qu’il est impératif de ne pas se désintéresser de ce problème en remettant toujours sa discussion à plus tard, comme l’a fait la dictature militaire sud-coréenne en d’autres temps.

Des réfugiés à l’avant-garde
Sokeel Park considère qu’une bonne intégration des réfugiés en Corée du Sud peut avoir des incidences psychologiques et économiques positives dans leur pays natal, par les virements qu’ils effectuent au profit de leurs proches et par les liens secrets qu’ils entretiennent avec eux.

Avec l’appui de David Alton, un membre de la Chambre des Lords britannique, il a donc entrepris de favoriser ces échanges en travaillant à la création par la BBC d’une nouvelle chaîne de radio qui diffusera ses émissions en langue coréenne, car leur multiplication ne peut qu’assurer un meilleur accès des Nord-Coréens à l’information.

De l’avis de Sokeel Park, il conviendrait aussi que la communauté internationale aborde les questions nord-coréennes sous un autre angle, car les discussions se sont centrées jusqu’ici sur la personne de Kim Jong-un et sur la course aux armements à laquelle se livre ce pays. Il tient à souligner l’importance du facteur humain que représentent ses 25 millions d’habitants et qui doit être davantage pris en compte. Dans ce but, son ONG réalise de nombreux et impressionnants reportages sur le sujet, tel ce documentaire de 52 minutes intitulé La génération des jangmadang, qu’il a tourné en 2018 pour présenter le cas de dix jeunes réfugiés et dans lequel le public de Corée du Sud s’est découvert des points communs avec ceux-ci.

Sokeel Park a l’espoir de parvenir à changer l’image que se font les Sud-Coréens du peuple de Corée du Nord afin qu’ils n’éprouvent à son égard ni hostilité ni condescendance et, à ce propos, les réfugiés peuvent servir de passerelle entre les deux pays.

Cette année, il s’est d’ailleurs vu récompenser de son action en faveur de ces réfugiés, ainsi que pour la défense des droits de l’homme en Corée du Nord et l’amélioration des relations entre la Grande-Bretagne et la Corée du Sud, par l’Ordre de l’Empire britannique, dit MBE, dont il a été décoré. Lors de sa remise, il a tenu à rendre hommage à tous les anonymes qui aident LiNK à secourir des réfugiés Nord-Coréens et à assurer leur sécurité.

Sokeel Park avoue même qu’il aurait préféré vivre en Corée du Nord, s’il en avait eu la possibilité, ce qui démontre la force des convictions qui l’animent dans son combat en faveur de la cause nord-coréenne.

Kim Hak-soon Journaliste et professeur invité à l’École des médias et de la communication de l’Université Koryeo
Ahn Hong-beom Photographe

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