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2020 SUMMER

Rubrique Spéciale

La chanson populaire coréenne de la guerre à la K-popRubrique Spéciale 5La musique populaire à l’heure des nouveaux médias

La musique populaire coréenne poursuit son évolution vers toujours plus de diversité grâce aux supports de diffusion classiques que constituent les médias audiovisuels, mais aussi, en ce XXIe siècle, par le biais des réseaux sociaux et des plateformes de streaming.

L’essor des nouveaux médias a entraîné l’apparition de formes ou styles si variés de musique populaire que l’on rechercherait en vain un genre dominant dans ce domaine. En revanche, le streaming en constitue sans conteste le mode de diffusion le plus courant et les classements qui fournissent le palmarès des ventes de disques ou d’albums donnent une idée très précise de la qualité de leur interprétation. Ceci dit, les classements du streaming accessibles en temps réel n’offrent pas une fiabilité absolue en raison de certaines pratiques qui faussent leurs résultats, comme celle qui consiste à diffuser en continu ses titres préférés pour qu’ils se situent en bonne place, ce que font notamment nombre d’amateurs de K-pop, les classements musicaux se réduisant dès lors à une « chasse gardée des idoles » dont sont exclus les artistes ne disposant pas d’un important effectif d’admirateurs.

Le succès de chanteurs au répertoire très différent de la K-pop apporte cependant la preuve que le talent d’un artiste ne se mesure pas à la taille de son fan club ou au nombre de ses passages à la télévision. Sa réussite est tributaire de la popularité fluctuante des émissions télévisées auxquelles il participe, car dès lors qu’apparaît, disparaît ou reparaît l’une d’elles, les agences de spectacle s’adaptent en conséquence à ces changements, tandis que les nouveaux médias et réseaux de communication offrent d’autres possibilités d’accession à la notoriété.

Lauréate de l’émission d’auditions à succès Miss Trot diffusée par la chaîne TV Chosun en 2019, Song Ga-in répond à des questions lors d’une conférence de presse. © News1

Im Young-ung se félicitant de sa victoire pendant l’émission Mr Trot qu’allait également proposer TV Chosun, de janvier à mars 2020, et dont le dernier numéro allait enregistrer le plus élevé des taux d’audience jamais enregistrés par un divertissement coréen de ce type. © Starnews

Du petit écran aux agences de spectacle

En 1977, dans le cadre d’une émission consacrée à la musique universitaire, la chaîne MBC allait proposer un nouveau concours de la chanson qui fournissait un moyen d’ à une culture jeune réduite au silence par la répression exercée en 1975 à l’encontre des artistes fumeurs de marijuana. Sa première édition allait couronner le titre Que faire ?, du groupe Sand Pebbles, et faire son succès immédiat auprès du public, comme ce serait le cas des lauréats des suivantes.

Quelque vingt ans plus tard, alors que cette émission perdait de son prestige, des agences de spectacle d’un genre nouveau ont fait irruption dans le domaine de la chanson populaire et bouleversé la situation de son marché. Des artistes toujours plus jeunes venaient frapper à leur porte et les heureux élus devaient entreprendre une formation rigoureuse de plusieurs années avant de pouvoir prétendre à se lancer au sein d’un groupe d’« idoles ». Le genre de la K-pop était alors en pleine gestation, de même que l’accès à l’Internet des particuliers et la création de sites en ligne, deux paramètres qui enregistraient une croissance exponentielle. Par ailleurs, les jeunes désireux d’exercer leurs talents dans d’autres styles musicaux choisissaient de le faire dans les clubs du quartier universitaire de Hongdae.

Au fur et à mesure que le réseau de communication mondial poursuivait sa progression spectaculaire, les pratiques de consommation de musique connaissaient une véritable mutation, notamment par le recours au téléchargement de fichiers MP3 supplantant l’habituel album sur CD, mais aussi, toujours plus souvent, par un accès illicite aux fichiers de type peer-to-peer (P2P) proposés par certaines plateformes dans le but d’en faire la musique de fond d’un profil sur les réseaux sociaux ou la sonnerie d’un téléphone portable.

Les carences de la législation en matière de téléchargement de musique et la baisse des ventes d’albums résultant de cette pratique ont provoqué un marasme du marché de la musique qui a perduré jusque dans ces années 2010 où le succès du smartphone et de l’environnement mobile correspondant ont permis sa relance. Aux téléchargements, succède d’ores et déjà le streaming, dont le rythme de développement rapide permet d’envisager l’apparition d’un véritable marché de la musique numérique.

Aux téléchargements, succède d’ores et déjà le streaming, dont le rythme de développement rapide permet d’envisager l’apparition d’un véritable marché de la musique numérique, puisque la position dominante qu’il occupe dans ce type de consommation semble se confirmer avec le temps depuis la fin de la première moitié des années 2010.

Les sommets du classement

Depuis la fin de la première moitié des années 2010, le streaming occupe une position dominante qui semble se confirmer avec le temps, en dépit de quoi certains artistes, sans pour autant figurer parmi les idoles de la K-pop ou faire de nombreuses apparitions à la télévision, voient leurs titres arriver systématiquement en tête des classements du streaming. Ils pratiquent surtout un répertoire composé de ballades et d’un accompagnement à la guitare acoustique qui met en valeur la qualité de leur chant. N’accordant que peu d’importance à l’apparence physique, contrairement aux vedettes de la K-pop pour lesquelles elle joue un rôle primordial, ces artistes quelque peu en marge mettent l’accent sur les sonorités agréables de leur voix et perpétuent ainsi le style traditionnel des vedettes de radio d’autrefois tout en le renouvelant.

Tel est le cas du chanteur Heize qui, après avoir entamé sa carrière en 2015, s’est fait peu à peu un nom et a fini par atteindre les premiers rangs du streaming avec ses titres Ne reviens pas et Cette étoile, ou du duo féminin Bolbbalgan4, peu remarqué à ses débuts, puis rendu célèbre par la chanson Galaxy et propulsé en tête des classements du streaming.

Sur les réseaux sociaux, le bouche à oreille joue un rôle important dans le succès de ces artistes différents qui privilégient la mélodie, le texte et la puissance de la voix, tandis que l’attrait des groupes de jeunes idoles repose sur un physique éblouissant et des mises en scène tapageuses. Si d’aucuns affirment que l’âge de la radio est révolu, celle-ci engendre toujours une certaine demande et seul a changé le support qu’elle emprunte, comme en témoigne le succès tenace des chanteurs à l’ancienne.

Premier enregistrement, en 2011 à New York, de la saison 3 de l’émission Superstar K dont le succès international s’expliquait par la présence de candidats étrangers. © Ukopia

Le retour du concours de la chanson

En 2009, les concours télévisés destinés à découvrir de nouveaux talents sont revenus en force grâce à l’émission Superstar K proposée par la chaîne musicale câblée Mnet, dont le nom est l’abréviation de Music Network. Contrairement à ce qui se passe dans les concours universitaires de la chanson, des candidats de tout âge peuvent y participer et se produire sur une scène. Si les épreuves visent à déceler leurs qualités artistiques, elles s’accompagnent aussi de récits de leur vécu qui tirent souvent des larmes au téléspectateur et incitent celui-ci à leur apporter son soutien en votant de chez lui en complément des délibérations d’un jury de professionnels. Lauréat de la première saison d’émissions, le chanteur Seo In-guk se double aujourd’hui d’un humoriste et ses successeurs ont eux aussi accédé à la notoriété.

Cette émission très appréciée allait entraîner dans son sillage nombre de divertissements du même type, notamment K-Pop Star, dont SBS a diffusé six saisons à partir de 2011, ou Show Me the Money de Mnet, qui a donné lieu à une huitième saison l’année passée, mais le plus prestigieux d’entre eux est à n’en pas douter Produce 101, également produite par Mnet et toujours aussi prisé depuis sa première saison intervenue en 2016. Sur le plateau, les spectateurs manifestent leur soutien à leur candidat préféré en brandissant bannières ou pancartes et en l’applaudissant bruyamment pendant ses prestations, tandis que, dans les communautés en ligne, les internautes s’extasient à qui mieux mieux sur son charme et son talent dans l’espoir d’accroître sa popularité auprès des téléspectateurs.

Le lien étroit qui se tisse ainsi entre les artistes, leurs admirateurs et les chaînes de télévision qui les accueillent transforme ces concours de la chanson en arènes musicales où sont disputées des rencontres qui s’apparentent à celles du sport. Tels les gladiateurs du Colisée, ces artistes privés de l’appui de puissantes agences de spectacle s’affrontent sous les yeux du public qui applaudit à tout rompre en assistant à leur combat sans merci, ce divertissement n’en constituant pas moins un aspect parmi d’autres du paysage de la musique populaire coréenne actuelle.

Créé en 1977 par la chaîne MBC, le Festival de musique universitaire allait faire des émules en matière de concours de la chanson, jusque dans les années 2000, où ce type de divertissement s’est étendu à des genres musicaux très divers dont le hip-hop, le trot ou le crossover. Ci-contre, affiches de Phantom Singer (JTBC), K-Pop Star (SBS), The Voice of Korea et Rappers lycéens, ces deux dernières émissions étant diffusées par Mnet, tandis que TOP Band l’était par KBS.

Le renouveau du trot

Il y a encore peu, le genre dit du teuroteu, ou trot, était considéré quantité négligeable dans le paysage musical coréen, comme en témoignaient ses parts du marché du streaming d’à peine 2% en 2019 et sa diffusion limitée à la vente d’albums par les magasins des aires de repos d’autoroute, les spectacles qui en proposaient n’ayant lieu qu’à l’occasion de manifestations de faible envergure ou de fêtes régionales, mais c’était sans compter sur l’apparition de l’Internet, qui lui donne actuellement une remarquable impulsion.

L’initiateur de son regain allait être le comique Yoo Jae-suk, l’un des artistes de télévision préférés des Coréens, qui a fait ses débuts dans ce genre musical en 2019, sous son nom de scène de Yoo San-seul, en animant l’émission de variétés Hangout with Yoo diffusée par la chaîne MBC. Suite à cette première prestation, quelle ne fut pas la surprise du public en voyant ses chansons remporter un énorme succès et arriver en tête des classements du streaming ! Celui qui était désormais le chanteur Yoo San-seul allait même ravir le Prix du nouvel espoir de la chanson de variétés lors du Grand prix du divertissement organisé par MBC en 2019 et laisser ainsi entrevoir la place de premier plan que peut occuper le trot dans l’industrie du divertissement.

Dans la foulée de la vague d’engouement suscitée par Yoo San-seul, TV Chosun produira en 2019 l’émission d’auditions Miss Trot, qui consacrera du jour au lendemain Song Ga-in, laquelle, après avoir été reléguée au rang d’obscure chanteuse des années durant, parvenait soudain à conquérir les cœurs en se démarquant de l’habituel trot de fusion par l’originalité de son style. Dès lors, elle allait séduire un nombre croissant de téléspectateurs d’âge moyen ou avancé qui allaient s’avérer tout aussi fidèles et enthousiastes que les jeunes fans des groupes d’idoles.

À son tour, la chaîne TV Chosun s’est engouffrée dans ce créneau en proposant une version masculine de l’émission, qu’elle diffuse depuis janvier dernier et qui a révélé le talent d’Im Young-ung. Contrairement à Miss Trot, qui, dans les premiers temps, présentait ses candidats un peu à l’improviste et sans s’efforcer de susciter l’intérêt du public, Mr Trot allait faire mouche dès le début en présentant des artistes qui affichaient une certaine personnalité et une dimension plus moderne tout en s’avérant d’excellents danseurs. Lors de sa dernière diffusion, outre que cette émission allait enregistrer un taux d’audience supérieur à 35% constituant un record national pour un spectacle de télévision, elle allait plaire aussi bien aux jeunes qu’aux moins jeunes.

Les lauréats de ces deux divertissements ont pris le parti de se détourner résolument du genre de la fusion afin de rester fidèles à l’âme de ces années 1960 et 1970 où le trot a connu ses heures de gloire grâce à des artistes à l’immense talent tels que Lee Mi-ja ou Na Hoon-a, qui savaient émouvoir leur public aux larmes par ce même style vocal « à l’ancienne » qui tomberait plus tard dans l’oubli.

L’actuel retour en force du trot par-delà le fossé des générations s’explique aussi peut-être par l’approche qu’adoptent les jeunes générations de chanteurs. Grâce aux vidéos présentées sur Youtube, des classiques du genre ont pu toucher le nouveau public de la génération numérique en comblant l’écart temporel qui séparait cette musique du consommateur actuel, comme cela s’est produit pour le genre de la pop dite urbaine, qui a été très appréciée dans les années 1980 et l’est à nouveau aujourd’hui, ou encore dans le cas de chansons à succès des années 1990, l’ancienneté n’étant donc pas forcément synonyme de désuétude aux yeux des Youtubers d’aujourd’hui. 

Kim Zak-kaCritique de musique et membre du Comité de sélection des Korean Music Awards

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